Les violences conjugales : comprendre pour agir

Les violences conjugales sont un fléau qui touche de nombreuses femmes en France chaque année. Mais que recouvre précisément cette notion ? Pourquoi certaines femmes restent-elles avec un conjoint violent ? Et comment en sortir ? Autant de questions complexes auxquelles cet article tentera de répondre.

En m’appuyant sur plusieurs témoignages et analyses d’experts, je décrirai les différentes formes que peuvent prendre ces violences, les mécanismes psychologiques qui amènent certaines femmes à rester et les obstacles qu’elles rencontrent pour partir. Je présenterai également des pistes pour les aider à se sortir de ces situations.

Mon objectif est de permettre une meilleure compréhension de ce phénomène, afin de savoir comment réagir face à une amie ou une collègue victime de violences conjugales. Car comprendre, c’est déjà agir.

Qu’est-ce que la violence conjugale ?

La violence conjugale regroupe l’ensemble des agissements d’un conjoint visant à obtenir un contrôle sur l’autre, que ce soit par la force physique, la manipulation psychologique ou la privation de liberté. Deux mécanismes clés sont à l’œuvre : le contrôle et la menace.

A. Les différentes formes de violences conjugales

On distingue principalement 5 types de violences conjugales :

  • La violence physique : coups, bousculades, séquestration
  • Les abus sexuels : viols conjugaux, pratiques sexuelles imposées…
  • Les violences psychologiques : intimidations, isolement de la victime, contrôle permanent…
  • Les violences verbales : critiques, insultes, dénigrement…
  • Le contrôle économique : interdiction de travailler, confiscation des revenus…

Ces violences, qui peuvent être utilisées de façon combinée, visent à rabaisser et soumettre le ou la partenaire. Leur gravité et leur fréquence ont tendance à s’aggraver avec le temps.

B. Un processus d’emprise reposant sur des stratégies bien rodées

La mise en place d’une relation de violence conjugale repose sur un savant mélange de séduction et de manipulation de la part de l’agresseur. Voici les principales étapes :

  1. Une phase de séduction intense au début de la relation.
  2. Progressivement, apparition de comportements de manipulation : isolement, confusion, culpabilisation…
  3. Utilisation de la menace et de la violence pour asseoir son emprise.
  4. Mise en place de mécanismes d’adaptation chez la victime pour faire face (déni, intériorisation, empathie…).

L’objectif est de provoquer chez la victime une sorte de «  »formatage mental » » pour obtenir sa soumission. Celle-ci finit par perdre confiance en elle et en son propre jugement.

Pourquoi certaines femmes restent-elles avec un conjoint violent ?

C’est LA question qui revient souvent : pourquoi ces femmes n’arrivent-elles pas à partir ? En réalité, de multiples facteurs objectifs et subjectifs se conjuguent pour les retenir.

A. La dépendance économique et affective

Beaucoup de femmes violentées sont financièrement dépendantes de leur conjoint, n’ayant pas ou peu travaillé, pas de logement personnel… Partir signifierait pour elles de se retrouver dans une grande précarité.

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De plus, elles restent très attachées sentimentalement à leur compagnon, gardant espoir qu’il change ou que leur amour le sauvera. La peur d’être seule ou l’illusion des débuts idéalisés de la relation sont aussi des motifs de ne pas partir.

B. L’intériorisation de la violence et la culpabilité

La stratégie de manipulation de l’agresseur finit par porter ses fruits. La victime a intériorisé l’idée qu’elle est responsable des violences qu’elle subit et qu’elle doit changer pour les faire cesser.

Sa grande empathie pour la souffrance de son conjoint la pousse également à rester pour l’aider, le soutenir. Son passé douloureux est vu comme une circonstance atténuante.

C. La volonté de préserver les enfants

Les mères violentées craignent souvent de priver leurs enfants de leur père si elles partent. Même si le père est violent ou absent, elles pensent qu’il vaut mieux pour l’équilibre des enfants qu’ils aient deux parents.

Leur propre enfance difficile ou le divorce de leurs parents ont aussi pu les convaincre qu’il fallait préserver la cellule familiale à tout prix.

D. Le poids des injonctions sociales

La pression de l’entourage ou les représentations culturelles peuvent pousser les femmes à rester. Par peur du regard des autres, de la honte vis-à-vis de leur famille. Ou par volonté de correspondre au modèle traditionnel de la «  »bonne épouse » ».

E. La difficulté à se reconnaître comme victime

Identifier la violence psychologique ou le contrôle comme des formes de violences conjugales n’est pas une évidence. Beaucoup de femmes pensent que seules les violences physiques «  »comptent » » et ne se considèrent donc pas comme victimes.

Le déni, la minimisation sont aussi des mécanismes de défense fréquents face à une réalité trop douloureuse à assumer.

F. La méfiance envers les institutions et le manque de soutien

Enfin, dernier obstacle, et non des moindres : la peur des représailles en cas de plainte et le manque de confiance dans les institutions pour assurer leur protection.

S’y ajoute un isolement social total, sans amis ni famille vers qui se tourner. Le rejet ou le manque de compréhension lors d’une première tentative de parler renforcent encore la méfiance.

Comment aider une femme victime à sortir de l’emprise ?

A. Savoir l’écouter et la croire

La première des choses est d’accueillir la parole de la femme, de reconnaître sa détresse et de ne pas remettre en cause son récit. Même si certains détails peuvent sembler anodins ou s’il est difficile d’imaginer la personne qu’elle décrit comme violente.

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Il est primordial de partir de son ressenti à elle et de ne pas porter de jugement.

B. L’informer de l’existence d’aides et l’orienter

De nombreuses associations comme l’Union des Femmes de la Martinique et des numéros d’appels d’urgence existent pour venir en aide aux victimes. Il est important de les connaître soi-même pour pouvoir les recommander.

On peut également conseiller à la victime de constituer une sorte de «  »kit de fuite » » avec double des clés, papiers importants, un peu d’argent… au cas où elle doive partir précipitamment.

C. L’encourager à porter plainte

Même si elle ne se sent pas encore prête à quitter son conjoint, il est capital de l’informer de l’importance du dépôt de plainte. Cela permet de officialiser la situation, de la sortir du silence et du déni. Et potentiellement de dissuader l’agresseur.

Il ne faut pas hésiter à l’accompagner physiquement dans cette démarche si besoin, pour l’épauler face aux potentielles réactions négatives.

D. Garder le contact et assurer un suivi

Une fois les premières démarches effectuées, il est essentiel de ne pas «  »lâcher » » la victime, de prendre régulièrement de ses nouvelles, de maintenir un lien. Même si elle fait machine arrière ou retourne auprès de son conjoint un temps.

Il faut lui montrer qu’on est là, disponible, à l’écoute, en cas de nouvelle crise ou de besoin d’aide. Et ne pas hésiter à solliciter un suivi psychologique si cela semble nécessaire.

Le profil des hommes violents

A. Des hommes qui cherchent avant tout à dominer

S’il n’existe pas de profil type, on retrouve chez la majorité des hommes violents des traits communs : jalousie excessive, caractère possessif, hypersensibilité à la frustration et aux conflits…

Ils considèrent bien souvent que l’homme est supérieur à la femme et utilisent la violence pour asseoir leur domination quand ils sentent celle-ci menacée. Ils supportent mal de ne pas avoir le contrôle absolu.

B. Des hommes qui reproduisent des schémas familiaux

Beaucoup ont grandi dans un climat de violence, que ce soit en tant que victime des brutalités d’un père violent ou témoin des violences subies par leur mère.

Ces traumatismes infantiles, qu’ils n’ont pas su dépasser à l’âge adulte, ressurgissent then dans leur propre couple. La violence devient alors un mode de fonctionnement quasi automatique hérité de leur environnement familial.

C. Des hommes qui refusent d’admettre leur responsabilité

La plupart des hommes violents ont en commun leur incapacité à reconnaître leurs torts et à demander pardon. Soit par orgueil, soit parce qu’ils considèrent normal d’utiliser la violence pour obtenir ce qu’ils veulent d’autrui.

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Ils rejettent systématiquement la faute sur leur victime, minimisent la gravité de leurs actes voire les nient en bloc. Ce qui rend impossible toute remise en question ou évolution positive.

Faut-il pardonner à un conjoint violent?

La question du pardon dans un couple marqué par la violence fait débat, notamment chez les victimes elles-mêmes. Voici quelques éléments pour y voir plus clair.

A. Le pardon n’efface pas la réalité des violences

Une femme peut choisir de pardonner une fois à son conjoint. Mais cela ne signifie en aucun cas qu’elle consent à subir de nouveaux sévices ou à minimiser ceux déjà subis. Le pardon n’est pas un blanc-seing pour l’avenir.

Et il ne dispense certainement pas l’agresseur de prendre ses responsabilités, de reconnaître ses torts et de tout mettre en œuvre pour changer.

B. Méfiance face aux faux repentirs

Certains hommes violents sont passés maîtres dans l’art de simuler le repentir et de promettre monts et merveilles après chaque crise. Avant de replonger invariablement dans de nouveaux accès de violence.

Il est donc essentiel d’être vigilante face à ce type de manipulation, de ne pas prendre pour argent comptant des regrets trop rapides qui ne s’accompagnent d’aucun acte concret ni travail sur soi.

C. Le pardon doit rester un choix individuel

Enfin, la décision de pardonner ou non à son agresseur est un choix éminemment personnel. Aucune victime ne devrait subir de pressions de son entourage ni se voir dicter sa conduite.

Charge à chaque femme de déterminer, en son âme et conscience, si elle estime que son compagnon mérite une seconde chance et est véritablement prêt à évoluer positivement.

Conclusion

Les violences conjugales constituent un phénomène complexe, où se mêlent enjeux psychologiques, sociaux et culturels. Comprendre les ressorts qui amènent certaines femmes à subir et à rester est indispensable pour leur venir efficacement en aide.

Car notre rôle à tous, en tant qu’ami, collègue, membre de la famille, est bien de leur tendre une main secourable. De les écouter, de les orienter, de les accompagner. Et surtout de ne pas les juger.

Cette mission délicate demande empathie, compassion et beaucoup de patience. Mais le jeu en vaut la chandelle. Car permettre à une seule femme de se sortir de l’emprise d’un conjoint violent, c’est lui rendre sa liberté et sa dignité de femme.

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